Les cuisiniers forment des cuisiniers et les aides-soignants forment qui ?
Les chauffagistes forment les chauffagistes, les cuisiniers forment les cuisiniers, les pâtissiers forment les pâtissiers, les médecins forment les médecins, les maçons de tous ordres forment les maçons et ceci semble logique à tout le monde. Mais QUI FORME LES AIDES-SOIGNANTES ?
Il est de notoriété publique que dans le contexte actuel les structures du médico-social manquent de personnel en aides-soignants. Mais, bien avant la crise sanitaire actuelle, les fédérations d’employeurs et d’usagers avaient tiré la sonnette d’alarme. Ces alertes sont longtemps restées sans écho de la part des pouvoirs publics.
La situation a changé avec l’apparition durable de la pandémie. Tout un chacun, au-delà des personnes âgées dépendantes et de leurs proches, sait aujourd’hui que les organismes du médico-social, dont particulièrement les EHPAD, manquent d’aides-soignants. Et la situation est tendue aussi du côté du domicile.
Il faut dix mois pour former un aide-soignant. Dix mois c’est beaucoup trop long face à l’urgence de la situation. Alors, on voit fleurir certaines initiatives soutenues par la direction générale de l’offre de soins dont le but est de former rapidement des renforts en aides-soignants.
Même si ces nouveaux soignants n’obtiendront pas en deux semaines ou en deux mois ni le niveau de compétences ni le titre officiel complet d’aide-soignant, certains syndicats professionnels crient au scandale. On crie à la dévaluation des métiers et il y a sans doute un risque dans ce sens. En même-temps, il s’agit de faire face à un besoin urgent. Il convient d’innover et, pour cela, de sortir des parcours usuels.
Mais où sont formées les aides-soignants et par quels formateurs ? Il existe près de 450 écoles d’aides-soignants en France qui délivrent le diplôme d’Etat. Ces écoles peuvent être publiques ou privées. Le programme de formation sur dix mois est actuellement unique. Il comporte des enseignements et des stages. Toutes ces écoles délivrent actuellement le DEAS diplôme d’Etat d’aide-soignant.
Alors, qui sont les intervenants formateurs qui forment les futurs aides-soignants ? Quelles compétences doivent-ils avoir ? Pour être formateur en IFAS (institut de formation pour aide-soignant) ou en IFSI (institut de formation en soins infirmiers) il faut être infirmier DE (diplômé d’Etat).
Un infirmier peut être formateur dans un IFAS sans avoir le diplôme de cadre de santé.
Pour être formateur dans un IFSI un infirmier pourra débuter en tant que « faisant fonction de formateur » pendant deux ans. Il ne pourra les dépasser sans se présenter au concours de cadre.
Dans les deux cas, ce qui est attendu des candidats formateurs ce sont des compétences pédagogiques ainsi qu’une bonne connaissance du métier des personnes formées soit ici, les aides-soignants.
Mais allons plus loin dans la liste officielle des compétences qui sont acquises par les infirmiers à l’issue de leur formation de cadres de santé et qui peuvent leur permettre d’être formateurs.
o Concevoir un enseignement en fonction du contexte, des objectifs visés et de la progression des personnes en formation
o Adapter la stratégie pédagogique aux objectifs, aux contenus et aux caractéristiques d’un auditoire professionnel
o Animer des groupes en formation dans le cadre d’une progression pédagogique
o Construire des outils de sélection des candidats
o Evaluer l’adéquation de la formation avec les évolutions dans le domaine de la santé
o Conseiller des étudiants en formation ou en stage dans leur apprentissage et élaborer un plan individuel de soutien
o Evaluer les prestations des intervenants
o Définir et développer des projets de recherche
o Concevoir des documents pédagogiques permettant la traçabilité de la formation et le suivi des résultats des étudiants et des élèves
o Développer le réseau de partenaires dans le domaine de la formation
Il est clair que le formateur infirmier doit être compétent en ingénierie pédagogique, qu’il est un animateur pertinent et que bien sûr il connait parfaitement le métier et les problématiques du métier de ses participants.
Si nous reprenons ces attendus et ces compétences du point de vue d’un aide-soignant également formateur professionnel pour adultes, mis à part le fait qu’il n’est pas infirmier, nous verrons que quasiment tous les critères demandés ci-dessus répondent « présent ».
o D’abord, en tant qu’aide-soignant depuis plus de quatre ans, il a à l’évidence une bonne connaissance du métier, des relations avec les autres soignants et de l’ensemble des services. Il ne sera pas faux de dire que la connaissance du métier d’aide-soignant par un aide-soignant lui-même est sans doute meilleure que celle que peut en avoir une infirmière ou une infirmière cadre probablement plus éloignée encore du métier du fait de ses responsabilités organisationnelles.
o C’est encore plus intéressant de voir que, en tant que formatrices professionnelles pour adultes, les compétences attendues des infirmières cadres qui souhaitent être formatrices sont parfaitement présentes chez une aide-soignante formatrice professionnelle pour adultes. Sans reprendre tous les critères, on notera une formation solide en ingénierie de formation, une connaissance des multiples outils et modalités pédagogiques, la conception de documents pédagogiques, le suivi personnalisé de chacun des apprenants et chose que de nombreux cadres ne savent pas bien faire, l’animation des réunions et des formations.
Alors, si les chauffagistes forment les chauffagistes, les cuisiniers forment les cuisiniers, les pâtissiers forment les pâtissiers, les médecins forment les médecins, les maçons de tous ordres forment les maçons et que ceci semble logique à tout le monde, il nous semble évident que des aides-soignants également formateurs professionnels pour adultes puissent former les futurs aides-soignants.
Pour ce billet JK de Métiv’Dvlop décembre 2020